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Activité physique et espérance de vie…

par | 22 Sep, 2023 | 0 commentaires

Aux Etats Unis, les experts que consultent les compagnies d’assurance vie ont développé la notion de « healthy way of life », q’un pourrait traduire par « habitudes d’hygiène de vie », au premier rang desquelles ils situent l’alimentation et l’activité physique. Le rôle bénéfique de celle-ci a été souligné il y a déjà plusieurs décennies par les travaux de Ralph PAFFENBARGER (11, 12). Bien que ses chiffres initiaux aient fait l’objet de plusieurs remises au cause (revoyant les prescriptions d’activité sérieusement à la baisse), le principe demeure. Il faut bouger pour vivre plus longtemps et en meilleure santé. Quel bénéfice en retirer ? Le vétéran de ces études s’est à nouveau singularisé en élaborant un questionnaire très simple qui, se référant à diverses données récentes et à son expérience, permet de quantifier le gain d’espérance de vie. La méthode rappelle les revues féminines, mais son impact frappe les esprits.

LA PRÉOCCUPATION DE TOUTE SA VIE :

Le professeur Ralph PAFFENBARGER, aujourd’hui âgé de 76 ans et qui a exercé toute sa carrière au sein de la célèbre Université de Stanford, fit parler de lui pour la première fois dans les années 50 lorsqu’il entreprit de mettre en rapport le niveau moyen d’activité physique et l’état de santé de ses concitoyens (11, 12). Le contexte différait alors sensiblement du nôtre ; si la dépense calorique à cette époque de l’après-guerre se situait, dans les classes ouvrières américaine à un niveau deux fois plus élevé que celui d’aujourd’hui, c’était plus la conséquence d’une activité professionnelle et d’une vie quotidienne très demandeuses que d’un véritable engouement général pour le sport. Pas de « boom » du jogging, et encore moins du tennis ou du golf pour contribuer à une dépense quotidienne de 3500 à 4000 calories par jour, voire plus, comme on le notait chez les dockers par exemple. Sa démarche ne souffrait aucune critique majeure. D’abord, chacun des travaux consacrés à ce thème s’est prolongé plusieurs années durant. Cette assiduité permet de déceler le moindre changement d’habitudes de vie. On peut également observer, dans un tel contexte, suffisamment de décès pour pouvoir dégager des tendances. Ensuite, il procédait à une « stratification » des individus suivis. Cela signifie qu’il élaborait différents groupes sur la base des niveaux d’activité moyenne, définie au terme de calculs rigoureux et précis. Ainsi chaque geste quotidien, aussi bien dans le cadre du travail que dans celui des loisirs ou que des activités quotidiennes, était minutieusement répertorié et la dépense calorique qui y correspondait était connue et ajoutée au total journalier.

Dernier élément fondamental à la réussite de telles études épidémiologiques : la taille des échantillons recrutés De ce point de vue, les enquêtes de Ralph PAFFENBARGER constituent des modèles du genre. En effet, qu’il s’agisse de l’étude menée pendant près de 15 ans auprès des dockers ou celle s’appuyant sur plusieurs groupes de fonctionnaires, toutes comportaient plusieurs milliers de sujets. C’est cette « puissance » statistique qui donna un poids énorme à ses propos, qui lui valurent d’ailleurs, dès ses premières publications, de défrayer la chronique et de heurter le monde médical.

PAS DE SALUT HORS DE L’ULTRAMARATHON :

Ses premières conclusions paraissent aujourd’hui, dans un contexte socio-économique qui a certes beaucoup évolué, teintées d’un indéniable extrémisme qui, pour cette raison-même, ne s’avérait guère réaliste ni porteur de recommandations pratiques à la portée d’une majorité de sujets modérément actifs. Qu’avait-il noté ? Comme le décrit abondamment Tim Noakes dans son ouvrage « Lore of running » (10), la courbe traduisant le rapport entre la dépense physique et l’espérance de vie présente l’aspect d’un « U » inversé. En-dessous et au-dessus d’un niveau minimal d’activité, le risque de maladie croît. Cela n’étonne pas trop : On conçoit empiriquement que l’inactivité, aussi bien que le surentraînement chronique, affaiblissent l’organisme. Ce qui frappa en fait les esprits lors de la publication de ses travaux, et aujourd’hui encore quand on les relit, c’est l’activité optimale conseillée, environ 9000 calories par semaine, chiffre difficile à atteindre spontanément pour quiconque ne serait pas docker, bûcheron (activité recensée parmi les plus coûteuses en calories (8) ou encore déménageur. Restent donc les loisirs et, de ce point de vue, Ralph PAFFENBARGER, n’y va pas de main morte. Celui qui très tôt, comme on a pu le découvrir dans les colonnes de « Runner’s World » de janvier 2000, devint un irréductible aficionado des épreuves d’ultramarathon, ayant par exemple pris part à de nombreuses épreuves pédestres de 100 miles, recommandait de préférence la course à pied pour brûler cette énorme quantité de calories. Cela tombe sous le sens dans la mesure où il s’agit d’un des moyens les plus rentables, la dépense pouvant dépasser, chez certains, 700 calories par heure. Mais faire courir tout le monde sans discernement n’irait pas sans mal. D’évidents problèmes de blessure ou de surmenage pourraient s’ensuivre (1), surtout si on n’applique pas les règles simples de l’entraînement que sont la progressivité et l’alternance (3, 13). Or ce chiffre correspond, pour un coureur moyen de 70 kg, à pas moins de 120 km par semaine. C’est ce qu’avalent, comme l’avait révélé un sondage exclusif mené par la rédaction de « VO2 Marathon » auprès de ses lecteurs, moins de 1% des compétiteurs sur route ! On comprend donc, pour cette raison, que l’intérêt pratique des conseils de Ralph PAFFENBARGER est nul. Même si par la suite il révisa ses chiffres à la baisse, pour proposer un niveau de dépense plus raisonnable, autour de 3000 calories par semaine (soit environ 40 km hebdomadaires), ces chiffres minimaux (et réalistes) qu’il continue de préconiser aujourd’hui paraissent encore trop élevés, y compris chez ses collègues où, il est vrai, on compte peu de sportifs et davantage de fumeurs…

LES DONNÉES LES PLUS RÉCENTES :

La plus récente recommandation publiée à ce jour vise à faire réviser les recommandations actuelle du « Collège Américain de Médecine du Sport ». Rappelons que celui-ci, de manière consensuelle, préconise de pratiquer au minimum 3 fois par semaine 30 mn d’activité continue à un rythme compris entre 50 et 85% de la fréquence cardiaque maximale théorique. La proposition du docteur CHAE s’appuie sur des travaux non moins rigoureux que les précédents. Entreprise auprès d’un échantillon de 22.000 médecins suivis pendant 12 ans, cette étude avait pour finalité de mesurer l’impact de leur niveau d’activité physique sur leur santé cardio-vasculaire (9). Notons bien que cette étude n’envisage que le bénéfice cardio-respiratoire associé à la pratique sportive, et non l’ensemble des pathologies susceptibles d’influer sur l’espérance de vie. Cette nuance est d’importance, et pourrait expliquer que le niveau d’activité qu’il juge souhaitable semble désormais ridiculement faible en regard des conclusions les plus modérées de PAFFENBARGER. Il l’est aussi en regard de celles du professeur CORDAIN, spécialiste de paléontologie humaine, (5), dont un récent article indique que nos ancêtres, ceux dont nous portons toujours l’ADN 2 millions d’années plus tard avaient, en survivant dans le contexte d’alors, sélectionné une descendance (c’est-à-dire nous-mêmes), capable de dépenser plus de 4000 calories par jour. Que ressort-il de cette nouvelle étude ? Qu’il suffirait de s’accorder 3 fois 20 mn de sport par semaine à un rythme assez soutenu pour se protéger efficacement des maladies de civilisation!

La marche vive pourrait même suffire, comme le suggère une récente publication (7). Menée auprès de retraités âgés de 61 à 81 ans, elle indique que s’ils profitent de leur cessation d’activité professionnelle pour marcher un peu tous les jours, ils prolongeaient notablement leur espérance de vie. Plus précisément, durant cette étude, la mortalité de ceux qui ne marchaient, en moyenne, que 1600 m par jour, atteignait une valeur double de celle relevée chez les seniors qui marchaient plus de 3,2 km quotidiennement. De surcroît, le nombre de décès totaux enregistrés lors de ces douze années au sein du groupe de marcheurs était atteint dès la 7ème année de suivi chez les non-actifs. Bien qu’aucun des sujets enrôlés ne fût fumeur (ou ex-fumeur), ce qui peut limiter l’extrapolation de ces conclusions, il est quand même troublant de noter qu’un minimum d’activité physique quotidienne, même instaurée tard dans la vie, joue un indéniable rôle protecteur face à la mortalité, toutes causes confondues. On attribue au développement ou au meilleur maintien des aptitudes aérobies la moindre mortalité des sujets actifs. De ce point de vue, on notera avec intérêt qu’un programme éducatif de deux ans, visant à élever le niveau de dépense physique chez des sujets sédentaires, en intervenant uniquement sur la vie quotidienne (montée d’escaliers, déplacement à la marche pour de petites distances, diminution du temps passé assis dans la journée), s’accompagne d’une augmentation de VO2 Max et d’une diminution de la pression artérielle moyennes, tout à fait comparables aux modifications observées chez d’autres volontaires ayant, pour leur part, intégré un programme structuré d’activité physique (aérobie, etc…) (6).

Forts de ces constats on conçoit donc que ceux qui entreprennent régulièrement une activité sportive de loisirs, et plus particulièrement depuis de nombreuses années, puissent influer sur leur espérance de vie. De surcroît au-delà de son action propre, l’activité physique (et notamment la course à pied sur laquelle PAFFENBARGER centre son questionnaire), génère de multiples comportements bénéfiques, sur le plan de l’alimentation, de l’hygiène de vie et du psychisme, tout à fait profitables, eux aussi. Le questionnaire prend également en compte les « facteurs de risque » de survenue des maladies cardio-vasculaires, à savoir le tabagisme, l’abus de mauvaises graisses, une certaine fragilité face au stress, des antécédents familiaux de maladies cardio-vasculaires, ou encore l’usage exagéré d’alcool. Il ne néglige pas non plus, d’un autre côté, l’émergence progressive de divers petits soucis qui, avec l’âge, peuvent compliquer la poursuite de cette activité après 50 ans. La perte de souplesse, le surpoids, les antécédents de blessure ou le surmenage, peuvent en effet affecter notre pratique, voire nous obliger à l’interrompre. Ce test englobe également des questions relatives aux habitudes de conduite automobile et au respect des règles de sécurité. En effet, les hécatombes routières survenant lors de nos longs week-ends printaniers nous le rappelle : Les accidents de la route constituent une autre importante cause de mortalité qui peut être modifiée par des changements d’habitude.

L’originalité de la démarche proposée par Ralph Paffenbarger réside dans la mise en équations, sous forme de tests très simples, de ces multiples facteurs. En fonction des réponses obtenues, il devient en effet possible de chiffrer le gain (ou le débours) d’années à notre espérance de vie. Comment marche-t-il ? Après avoir répondu à l’ensemble des questions, pour lesquelles les experts ont élaboré une cotation qui prend en compte les différents éléments évoqués ci-dessus, vous additionnez les points obtenus. Si le total est positif, vous l’ajoutez à 74 (ou 76 dans le cas des femmes). Si hélas il est négatif, vous retranchez ce chiffre de 74 (ou 76). Ainsi, si l’addition des réponses vous donne un total de « 12 », vous saurez que vous disposez d’une espérance de vie de 86 (ou 88) ans.

ENCADRÉ : ESPÉRANCE DE VIE.

Actuellement, les Françaises possèdent une espérance de vie de 76 ans, contre 74 à leurs homologues masculins. L’espérance de vie constitue une donnée statistique complexe qui indique l’âge moyen, à une époque donnée, qu’un individu peut espérer atteindre. Elle représente la résultante des espérances de vie de chaque tranche d’âge. Ainsi, la moyenne actuelle sous-estime-t-elle les chances d’un jeune né en 1980 de devenir centenaire. De plus, les progrès de la médecine et l’introduction de nouvelles (bonnes) habitudes permettent d’élever régulièrement ce chiffre. Ainsi aujourd’hui, un jeune Français de 30 ans peut considérer qu’il dispose encore au moins de 44 ans à vivre. Mais dans 20 ans, si l’espérance de vie a encore crû de 3 ou 4 ans, il pourra raisonnablement chiffrer à 28 le nombre d’années qui lui restent. Ce chiffre dépendra bien sûr de ce qu’il aura fait entre temps.

Car la longévité est à la fois affaire d’hérédité et de mode de vie.

LE TEST DE PAFFENBARGER :

Question 1) : Quel est votre âge ?

 

HOMMES                 FEMMES

Moins de 25 ans :        0                                 + 7

De 26 à 40 ans :         + 2                               + 7

De 41 à 50 ans :         + 3                               + 7

De 51 à 60 ans :         + 4                               + 8

Plus de 61 ans :          + 6                              + 10

Commentaire : Les femmes vivent en moyenne plus longtemps que les hommes. On ne s’étonnera donc pas de leur voir attribuer un meilleur score qu’eux au même âge. Par contre, le privilège accordé aux plus vieux d’entre nous pourrait surprendre. Cet étonnant paradoxe s’explique si on considère plus attentivement la définition de « l’espérance de vie » ; il s’agit en fait de définir le nombre moyen d’années restant à un groupe d’individus donnés avant la mort. L’espérance de vie des sujets de trente ans englobe ainsi les individus qui vivront vieux et ceux qu’un décès prématuré va ensuite rayer des registres. A mesure qu’on avance dans l’âge, l’espérance de vie des survivants tend donc à s’allonger. En outre, comme le rappelle le professeur PROUST dans son ouvrage : « Tout savoir sur la prévention du vieillissement » (14), si on arrive en bonne santé à l’âge de 60 ans, la probabilité de vivre encore 20 ans est fortement accrue. Ces éléments expliquent donc la « prime à l’ancienneté » qui est accordée avec ce barème.

 

Question 2 : Quel est le niveau de votre tension artérielle ?

 

  • Normal et régulièrement contrôlé                                           + 3
  • Pression artérielle élevée, mais traitée et contrôlée :           – 1
  • Pression artérielle élevée, non contrôlée                                – 6
  • Pression artérielle élevée, fumeur, cholestérol élevé            – 9

 

Commentaire : Le barème est on ne peut plus logique. Il intègre la notion de risque associé à une tension élevée, ainsi que le rôle relativement protecteur, vis-à-vis de cette pathologie, d’un traitement approprié. Certains sports, notamment les disciplines d’endurance, favorisent la possession d’une tension normale ou basse. Relativement à ce critère, les coureurs ou les nageurs se trouvent donc avantagés.

 

Question 3 : Quel est la valeur de votre « Body Mass Index » (BMI) (*) ?

 

  • 0-20                                         0
  • 21-24                                     +1
  • 25-34                                       0
  • 35-39                                     – 1
  • 40-49                                     – 3
  • Plus de 50                             – 6

 

(*) : le « BMI » est le quotient (P)/(T²), où (P) est le poids (en kg) et (T²), la taille (en m), élevée au carré.

Commentaire : Ce critère, mis au point par les spécialistes de l’obésité, rend bien compte du surpoids des individus, et sert beaucoup  dans les enquêtes de santé publique. Plus sa valeur est élevée, plus le surpoids augmente, et avec lui augmentent les facteurs de risque associés. A noter que la gamme de valeur idéale (BMI entre 25 et 34) est aussi bien coté que le BMI le plus bas ; la maigreur (qui chez des sédentaires peut correspondre au tabagisme, à une dépendance à l’alcool ou à un état de santé plus fragile) n’est pas un critère absolu de santé. Pour un coureur de 1,83 m, le BMI le mieux coté (+ 1), est celui qui correspond à : 70,3 – 80,4 kg. Cette norme couvre toute une gamme de poids, de celui du marathonien affûté à celui du « quinca » actif qui se surveille. Une mauvaise cotation (-1), correspondrait à : 117 – 130 kg.

 

Question 4 : Existe-t-il, chez vous, des antécédents familiaux de problème cardio-vasculaires ?

 

–  Mes deux parents ont vécu jusqu’à 70 ans et n’ont connu aucun problème cardio-vasculaire avant l’âge de 60 ans :                + 2

–  L’un de mes parents a souffert de problèmes cardiaques ou est mort d’infarctus avant 60 ans :                                                    – 1

–  Au moins deux frères et sœurs ont eu des problèmes cardiaques avant l’âge de 60 ans :                                                                – 2

–  Mes parents n’ont pas encore 70 ans et sont en bonne santé :                                                                                                                 0

Commentaire : L’apparition d’une maladie cardio-vasculaire dépend de multiples facteurs, certains sont liés aux habitudes de vie, d’autres (évoquées ici), ont trait à l’hérédité. Plus la famille compte de membres atteints de troubles cardio-vasculaires, et plus le risque d’en être soi-même atteint croît, d’où les scores attribués aux différents cas de figure mentionnés

 

Question 5 : Combien de kilomètres couvrez-vous, chaque semaine, en moyenne ?

 

  1 à 16 : 

     + 1

  16 à 32 :  

     + 2

   32 à 48 :   

      + 3

42 à 64 :  

       + 3

65 à 80 :

 :     + 2

  Plus de 80 

:       + 1

 

Commentaire : Comme pour le poids, on retrouve la courbe en « U », qui s’inverse pour un kilométrage somme toute modeste. D’un strict point de vue cardio-vasculaire, et en considérant que les deux catégories d’athlètes ne diffèrent pas sensiblement sur le plan pondéral, ceux qui courent 80 km par semaine ne seraient pas mieux protégés des maladies cardio-vasculaires que ceux qui se contentent de 16 km hebdomadaires. Ce constat renvoie aux recommandations actuelles, qui indiquent qu’il suffit de trois séances hebdomadaires de 30 mn pour se prémunir valablement contre les maladies cardiaques. Si on considère que, chez ces coureurs peu performants, les séances s’effectuent à 10 km/h, on retrouve bien l’effet protecteur décrit. Au-delà de 80 km, le bénéfice procuré n’est pas supérieur à celui qu’apporte le jogging dominical. Pourquoi ? A la fois parce que l’influence favorable de la course se manifeste sous forme de « tout » ou « rien », et que la dose nécessaire à ce qu’un avantage s’observe est faible. D’autre part les kilométrages les plus élevés s’observent chez des compétiteurs très impliqués, soumis à davantage de stress, ce qui fragilise leurs défenses immunitaires et leur système hormonal (voir les autres dossiers dans ce « hors-série »). Or cette situation peut alors faire le lit de maladies plus graves comme le cancer. Chez les plus assidus, certains inconvénients viennent donc modérer l’avantage tiré de leur attrait pour la course.

 

Question 6 : Pratiquez-vous l’entraînement croisé (vélo, natation, aquajogging, VTT, rameur, musculation) de manière régulière ?

 

  • Oui :               + 1
  • Non :              – 1

 

Commentaire : L’idée commence à faire son chemin. Pour se prémunir contre les blessures musculaires, qui chez le vétéran peuvent entraîner un arrêt prolongé et donc faire perdre rapidement l’avantage tiré d’une pratique athlétique régulière, il est sage de diversifier et d’introduire des activités de substitution (3, 19). On doit également prendre en compte le moindre risque d’atteinte osseuse ou articulaire, dans la mesure où l’entraînement croisé limite le cumul d’ondes de chocs auxquels les tissus se voient soumis. Enfin, il faut également considérer la moindre saturation psychologique associée à cette plus grande variété.

Question 7 : Pratiquez-vous régulièrement le stretching ?

  • Oui :               + 1
  • Non :              – 1.

 

Commentaire : Longtemps les experts se sont partagés sur la question. En effet, quelques travaux ont fait état d’un risque accru de blessures chez des athlètes auxquels on préconisait l’introduction de stretching à leur préparation. Toutefois, on admet aujourd’hui que leur pratique régulière et de manière appropriée réduit notablement le risque de blessure (2, 10).

Question 8 : Avez-vous, au cours des deux dernières années, dû interrompre votre entraînement en raison d’une blessure consécutive à votre pratique athlétique ?

  • Oui :             – 2
  • Non :           + 2

 

Commentaire : On sait aujourd’hui que le risque de contracter une blessure de « surcharge », touchant les muscles, les os ou les tendons, dépend en partie de facteurs individuels qui y prédisposent. Divers travaux ont établi qu’on se blessera d’autant plus facilement si, dans un passé proche, on a déjà connu des pépins de cet ordre (11). L’influence de cette « hérédité » malheureuse explique d’ailleurs en partie les contradictions observées au moment d’interpréter les études portant sur l’influence du stretching (voir question précédente), car en exécutant mal certains exercices sollicitant des tissus fragilisés, on accroît le risque de se faire mal.

 

Question 9 : Depuis combien d’années courez-vous ?

  • d’un à dix ans :                      + 1
  • de 11 à 20 ans :                    + 2
  • Plus de 20 ans :                    + 3

 

Commentaire : Plusieurs raisons expliquent cette prime à l’ancienneté. D’une part, les néophytes ont souvent tendance, après un ou deux ans de pratique, à se prendre au jeu et à augmenter très fortement leurs charges de travail. Ils en élèvent d’autant leur risque de blessure. D’autre part, l’ancienneté de pratique s’accompagne de l’acquisition durable d’habitudes favorables, aussi bien sur le plan de la récupération que des étirements ou de la diététique. Le risque de blessure s’abaisse d’autant. Enfin, le fait de courir depuis longtemps signifie qu’on a échappé aux grosses blessures, et qu’on se range donc parmi les athlètes de composition solide, avantagé par la nature et qui, ayant peu interrompu leur pratique, bénéficient donc au maximum du rôle protecteur de leur activité favorite. D’un point de vue plus général, ceux qui courent depuis plus de 20 ans se sont évidemment dotés d’un capital santé qui les prémunit davantage contre les maladies de civilisation. En termes de santé, la patience et l’assiduité paient.

Question 10 : Avez-vous connu des problèmes de conduite ces dernières années ?

 

  • aucun accident et aucune infraction depuis 3 ans :                                                                                                            + 1
  • entre 1 et 3 accidents ou infractions dans ce délai :                                                                                                              0
  • au moins quatre accidents ou infractions en 3 ans :
  • et un âge compris entre 16 et 34 ans :                                                                                                                           – 4
  • et un âge compris supérieur à 35 ans :                                                                                                                           – 2
  • sanctionné 1 fois pour conduite avec une alcoolémie trop élevée au cours des 5 dernières années :                        – 6
  • plusieurs fois sanctionné pour cette raison ces 5 dernières années :                                                                              – 12

Commentaire : Les accidents de la route constituent l’une des causes de mortalité les plus significatives, et les hypothèses présentées ci-dessus hiérarchisent les qualités de conducteur. La sobriété, la prudence et l’expérience que confère l’âge (la moitié des gens tués lors d’accidents de la route ont moins de 30 ans) sont bien sûr des critères déterminants vis-à-vis du risque de mort violente.

 

Question 11 : Portez-vous une ceinture de sécurité ?

  • oui :              + 1
  • non                  0

 

Commentaire : La prime à la prudence relève de la même logique que dans le cas de la question précédente, en dépit d’un débat régulièrement relancé sur cette question.

 

Question 12 : Fumez-vous ?

  • Je n’ai jamais fumé :                                              + 2
  • J’ai cessé depuis plus de 2 ans :                          + 1
  • J’ai arrêté depuis moins de 2 ans :                       – 1
  • Je fume moins de deux paquets par jour :          – 4
  • Je fume plus de deux paquets par jour :              – 8

 

Commentaire : la responsabilité du tabagisme dans la survenue de maladies cardio-vasculaires et des cancers des voies respiratoires supérieures ou de la vessie n’est plus à démontrer. Le barème proposé semble donc logique, et prend notamment en compte l’impact d’un tabagisme ancien, preuve s’il en est de la persistance quasi chronique de certains effets néfastes de cette funeste habitude. Même si peu de nos lecteurs obtiennent  (- 4) ou (-8) à cette rubrique, nous nous permettons d’attirer votre attention sur le problème que pose le tabagisme passif, notamment chez les jeunes. Il n’est pas pris en compte dans l’analyse des auteurs américains qui ont élaboré ce questionnaire. Or il s’agit d’un autre aspect de ce fléau, en particulier chez les plus jeunes. Pour en évaluer l’importance, on considère en général que le tiers de la fumée produite par ses proches voisins (à moins d’un mètre de distance) est inhalé. Ainsi, celui (ou celle) qui partage la vie d’une personne qui grille ses deux paquets quotidiens avale autant de goudrons qu’un fumeur « modéré » à 16 cigarettes par jour.

 

Question 13 : Buvez-vous de l’alcool ?

 

  • non :                                                                                  + 1
  • un à deux verres de vin ou de bière par jour :            + 1
  • 3 à 4 verres, au moins 3 fois par semaine :                – 3
  • 5 à 6 verres, au moins une fois par semaine :          – 6.

 

Commentaire : L’impact de l’alcool dépend de la boisson ingérée ; ainsi les alcools fermentés (vin, bière), pris à dose modérée, n’ont pas d’incidence néfaste, avec une prime au vin rouge, comme le soulignent part exemple les études les plus récentes mettant en exergue la supériorité du régime crétois (3, 16) ou le « paradoxe français » (15, 17) que les auteurs américains, à l’origine de ce questionnaire, boudent ostensiblement. Or, en vertu du rôle protecteur du vin rouge, celui qui en consomme modérément et de manière régulière peut moduler le barème en sa faveur : Si vous buvez deux verres quotidiens de vin rouge, accordez-vous par conséquent un (+ 2). Mais ceci ne vaut que pour le vin rouge car, à l’inverse, les alcools forts (apéritifs, digestifs) s’avèrent beaucoup plus néfastes. Le danger de l’alcool dépend également des doses ingérées. Ainsi, dès qu’on excède les deux verres quotidiens, le vin rouge perd son statut privilégié. Au-delà, toute boisson alcoolisée peut se révéler nocive, dans la mesure où sa consommation est suffisamment fréquente (18, 21). C’est là le dernier critère pris en compte : la fréquence des prises.

 

Question 14 : Quelle quantité de stress subissez-vous ?

  • le stress exerce une influence positive sur ma vie :                    + 1
  • Je le vis avec des hauts et des bas :                                                 0
  • il me dépasse :                                                                                    – 1

 

Commentaire : Le stress est souvent présenté comme un facteur de risque, en raison des effets physiologiques (état d’alerte) par lesquels il se manifeste (17, 19) . En fait, le stress peut constituer un formidable moteur, l’aiguillon qui fait avancer s’il est accepté de manière positive (en d’autres termes, s’il est « bien géré »). Par contre, s’il inhibe ou agresse, il peut effectivement faciliter la survenue de multiples maladies, qui trouvent l’opportunité de s’exprimer à cause de l’abaissement des défenses immunitaires qui fait suite à un stress négatif durable. Le cancer pourrait, lui aussi, s’exprimer plus aisément dans ce contexte. La course à pied tend à favoriser l’évacuation des tensions psychiques et la gestion des angoisses quotidiennes. Cela étant, celui qui investit exagérément dans la compétition et en tire tensions, contraintes et frustrations n’œuvre sans doute pas en faveur de sa santé. Le véritable problème que pose finalement cette question, c’est celui de la capacité d’auto-évaluation des effets que le stress exerce à un moment donné sur chacun de nous. Il s’agit d’une démarche à la fois empirique et subjective.

 

Question 15 : Mangez-vous beaucoup de graisses saturées (viande, charcuterie, fromage gras, graisses cuites, crème) ?

 

                                                                                     Moins de 60 ans                     Plus de 60 ans

– très peu :                                                                              + 3                                           + 3

– peu (1 à 2 fois par semaine)                                             + 2                                           + 1

– raisonnablement (3 à 4 fois par semaine)                         0                                              0

– chaque jour :                                                                          -2                                             – 1

 

Commentaire : le barème tient à la fois compte de l’âge et du niveau approximatif des apports, ce qui est logique en regard de la large part de responsabilité des graisses animales dans la survenue des maladies cardio-vasculaires et de certains cancers, en particulier avant 60 ans (4, 16). Cependant, le regard porté sur les graisses d’origine animale aurait mérité davantage de nuance, comme on le sait aujourd’hui. En effet, on connaît parfaitement le rôle extrêmement bénéfique exercé par les lipides des poissons gras ou du canard et, inversement, l’abus de graisses « cuites », cachées ou « trans » nous pénalise indéniablement. On peut également se demander le pourquoi de la prime à l’âge. C’est parce que ceux qui ont échappé à ces fléaux avant 60 ans présentent ensuite un risque moindre d’en être atteints.

Autre réserve à émettre, le questionnaire tient compte des habitudes américaines, et mérite à cet égard d’être quelque peu nuancé. Ainsi, les relations entre l’alimentation et les problèmes cardiaques ou le cancer ne se limitent pas à cette seule catégorie de denrées. C’est la globalité de la ration qu’on doit prendre en compte avec par exemple le niveau des apports en micro-nutriments protecteurs, en fibres, ou encore le niveau calorique global de la ration. On peut penser, de ce point de vue, que nos lecteurs se trouvent globalement moins exposés que les sportifs d’Outre-Atlantique.

C’est maintenant à vous de compter vos points et de procéder au calcul final.

Ce test n’a évidement qu’une valeur informative et ludique.

BIBLIOGRAPHIE :

(1)   : ASTRAND P, RODAHL K (1994) : « Précis de physiologie de l’exercice musculaire »- 3ème Ed. : Masson Ed.

(2)   BILLAT V (1998) : « Physiologie et méthodologie de l’entraînement- De la théorie à la pratique », De Boeck Ed.

(3)    : BRUN B (1998) : « L’entraînement en course à pied » (publié à compte d’auteur).

(4)    : BURCKEL A (1999) : “Les bienfaits du régime crétois”, J’ai Lu Equilibre Ed.

(5)   : CORDAIN L, GOTSHALL R & Coll (1998) : Int.J.Sports Med., 19 : 328-35.

(6) : DUNN A, MARCUS B & Coll (1999) : J.A.M.A., 281 (4) : 327-34.

(7) : HAKIM A, PETROVITCH H & Coll (1998) : New Eng.J.Med., 338 (2) : 94-9.

(8) : KATCH F, McARDLE W (1985) : « Nutrition, masse corporelle et activité physique“, Vigot Ed. : 278 p.

(9) : KRUCOFF C (1997) : Intern.Herald Tribune, Dec 18 : 11.

(10) : NOAKES T  (1994) : „Lore of running“, Oxford Univ.Press : 804 p.

(11) : PAFFENBARGER R, WING A (1983) : Am.J.Epidemiol., 117 : 245-57.

(12) : PAFFENBARGER R, HYDE R (1984) : Clin.Sports Med., 3 : 297-308.

(13) : PERONNET F, THIBAULT G & Coll (1987) : « Le marathon », Vigot & Decarié Ed.

(14) : PROUST R (1999) : “Tout savoir sur la prévention du vieillissement »,

(15) : RENAUD S, DE LORGERIL M (1992) : Lancet, 339 : 1523-6.

(16) : RENAUD S (1998) : « Le régime santé », O.Jacob Ed.

(17) : RIGAUD D (2000) : Cah.Nutr.Diét., 35 (2) : 85-92.

(18) : RICHE D (1998) : “Guide nutritionnel des sports d’endurance”, Vigot Ed. : 368 p.

(19) : RICHE D, ROUSSEAU V (1999) : « 42 questions sur le marathon », VO2 Editions.

(20) : SCHERMAN D (1987)  « La biologie du stress », Le Rocher Ed. : 125 p.

(21) : TAPPY L (2000) : Cah.Nutr.Diét., 35 (2) : 81-4.

(22) : VINCENT JD (1986) : « La biologie des passions », O.Jacob Ed.

 

Denis Riché, pour « Sport & Vie » – 2013

Photos  : MCC

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