Profitant de cette belle matinée ensoleillée du 16 janvier 2021, je décidai de me rendre à Nîmes pour y accomplir des formalités ennuyeuses (notez, je vous prie de m’en excuser, le pléonasme dès la première phrase de ce texte).

Je me dirigeai d’abord vers le bureau de Poste situé à proximité du cabinet, dans le but d’y ouvrir un compte « auteur », lequel serait destiné à accompagner la sortie du prochain livre. Arrivant au guichet, j’explique ma demande. Les dialogues qui suivent sont bien réels :

– Bonjour Madame, je possède déjà un compte individuel chez vous, et je souhaiterais en ouvrir un autre dans cette agence, pour les droits d’auteurs et les achats de livres.

– Ah, mais c’est un compte pro alors, ce n’est pas ici.

– Non, l’activité d’auteur, depuis toujours, rapporte des droits d’auteur qui s‘ajoutent à des salaires. Cela concerne donc des personnes et non des sociétés.

– Ah oui, mai de toute façon les conseillères ne sont pas là le samedi, il faut revenir en semaine.

– Mais Madame si je viens le week-end, c’est parce que je travaille la semaine…

– Dans ce cas, laissez-nous vos coordonnées et une conseillère vous rappellera pour vous proposer un rendez-vous en semaine… Ah mais je vois que vous n’êtes pas enregistré sur notre agence. Votre fils qui est un mineur, lui a bien un compte ici, mais pas vous…

– Mais Madame, si j’ai pu ouvrir ce compte c’est que j’ai fourni des justificatifs, et puisqu’il vit avec moi, j’ai forcément donné mon adresse.

– Ecoutez, l’ordinateur n’a pas dû enregistrer le changement.

– Franchement, mettez-lui un blâme, ce n’est pas la première fois qu’il se trompe. Alors comment fait-on ??

– Je vous l’ai dit, on  vous rappelle dans la semaine, c’est la procédure Monsieur, on n’y peut rien.

Sur ce, je tourne les talons, quitte le bâtiment et me dirige d’un pas leste, un peu essoufflé (je vous laisse deviner pourquoi), vers un autre lieu, cette fois pour valider la carte d’abonnement aux transports de l’agglomération nîmoise pour mon fils.

– Voilà bonjour Madame, je viens vous voir car j’ai voulu procéder à l’achat d’une carte d’abonnement sur internet, mais la démarche a échoué, il y a une étape qui bloque. J’ai tenté d’appeler le numéro de votre site, personne ne répond.

– Oui je sais, depuis le Covid, on manque de personnel et on ne répond plus aux appels.

– J’espère qu’ils ne sont pas morts au moins…

– Je ne retrouve pas le dossier de votre fils. Avez-vous sa carte d’identité ?

– Oui j’en ai une photo sur le téléphone.

– Très bien. Et une photo d’identité ?

– Oui sur le téléphone…

– Mais enfin on ne veut pas de photo de la photo, mais une photo d’identité.

– Ah bon, vous en faites quoi ?

– On la scanne et on la rentre dans le dossier.

– Mais si je vous envoie par mail la photo que j’ai, qui est déjà scannée, c’est pareil ?

–  Non, pas du tout Monsieur, on scanne les vraies photos d’identité…

–  Donc je dois revenir.

–   Oui, c’est comme cela, on n’y peut rien c’est la procédure.

Retournant d’un pas lourd vers mon véhicule, je n’ai pu m’empêcher de penser à la morale de cette série d’épisodes. Si l’informatique, supposé améliorer la qualité de notre vie, a gangréné tous les systèmes administratifs dans le but d’améliorer les démarches, mais que tout est plus compliqué, cela signifie bien que ce supposé progrès comporte une contrepartie encore plus importante. Sinon, tout serait plus facile. Je n’ai pu m’empêcher de penser au film « Brazil », de Terry Gillian, sorti en 1985, œuvre absurde et prémonitoire se déroulant dans un futur lointain. J’aurais en envie d’informer son génial réalisateur, connu comme étant la tête pensante des Monty Python, qu’on était déjà entré dans cette monde futuriste, sans que cela ne semblât affoler quiconque…

Denis Riché -Janvier 2021

Photos : Jiji 

Catégories : Regard sur la société